Le schéma d’apaisement voulu par le Président est en marche. Il agit seul et dans tous les domaines qui comptent à nos yeux pour y arriver. Les discussions ne pouvant régler aucun problème à ce stade, il choisit alors la méthode du père de famille. Face aux récalcitrants, il n’y a pas à convaincre, mais à s’imposer comme le seul qui décide. C’est pourquoi nous avons connu la période de répression sanglante pendant toute la période de changement de république. La bataille a été rude, mais le vainqueur allait forcément être celui qui disposait de moyens militaires et des ressources financières. Tout a donc marché comme le plan le voulait.
Le plan le voici : réprimer, faire peur, mettre aux arrêts quelques éléments clés de la bande à Sanoh et Dalein. La situation deviendra ainsi calme, par la force des choses. La disparition en grand nombre des jeunes et même des tout petits, a fini par mettre un terme aux mouvements de protestation pour des faits politiques. Nous en sommes là. Il a la situation en main. Il peut décider de la marche à suivre. En tant que Chef, il décide des sanctions à infliger à chacun des détenus. Les juges appliquent alors la loi de l’exécutif fort. Les procureurs ne sortent d’ailleurs pas de cette emprise. Ils en sont obligés selon le porte-parole de l’Etat.
Tous ceux qui sont détenus actuellement, ne le sont pas forcément pour des fautes envers la société et la République. Ils sont en prison pour leur prise de position et des discours qu’ils ont tenu. Il n’existe pas d’éléments matériels qui démontrent qu’ils en voulaient à la nation. D’ailleurs, les débats dans les tribunaux ont fini par conforter ce regard d’une frange importante de la population guinéenne. Mais nous n’oserons pas dire que c’est injuste. Tant que c’est la loi du Président qui est transgressée, nous sommes dans l’obligation de nous taire. C’est lui qui décide : de la constitution et de toutes les lois qui gouvernent le pays.
Mais le plan a tout prévu. Les condamnés seront tous graciés. Et lorsqu’il décide de jouir de son impérium pour paraître gentil, il suffit de prendre un décret. Là également on se rend compte, que c’est vraiment lui le Chef et nous devons l’admettre. Mais pour que le Chef soit gentil, les détenus sont d’abord invités à reconnaître son autorité. Ils peuvent en ce moment se mettre à genoux, lui demander pardon et promettre de ne plus jamais remettre en cause son pouvoir qu’il souhaite garder jalousement. Ils n’ont que peu de choix de toutes les façons.
Grenade et Madic sans frontières recouvrent leur liberté. Ils sont vivants et ils peuvent appartenir à la société guinéenne. Mais attention : le combat politique le plus louche n’est pas seulement mené par le pouvoir d’Alpha Condé. Les deux détenus qui viennnent d’être graciés, avaient pris de gros risques au nom de l’UFDG de Cellou Dalein Diallo, qui avait cru que la violence pousserait son adversaire à lui céder Sékhoutouréyah. Il a perdu la bataille, et s’il souhaite poursuivre la guerre, il doit d’abord rassembler ses soldats.
Jacques Lewa LENO