Si certains ministères des Affaires étrangères ont publiquement condamné l’invasion russe en Ukraine, d’autres ont voulu maintenir une certaine distance, tout en exhortant les belligérants à la négociation. Les pressions diplomatiques, de l’Union européenne comme de la Russie, se sont multipliées depuis le premier jour pour qu’ils expriment leur point de vue sur la guerre.
Dans un discours très remarqué, c’est le Kenya à l’ONU, le premier, qui a condamné l’usage de la force par la Russie et le mépris de la diplomatie. À sa suite, le Ghana, membre du Conseil lui aussi, a dit son soutien à « l’intégrité territoriale de l’Ukraine », comme le Gabon, troisième membre africain, qui a, lui aussi, a voté la résolution condamnant « l’agression » russe et appelé à un cessez-le-feu immédiat.
Après quoi, la Cédéao, ainsi que le président sénégalais Macky Sall et celui de la Commission de l’Union africaine Moussa Faki Mahamat, ont, eux aussi, « condamné […] l’invasion militaire » et « exhorté » les deux parties à « un cessez-le-feu » et à des « négociations sans délai », de même que le Niger, le Maroc, la Côte d’Ivoire et l’Afrique du Sud, pourtant alliée de la Russie au sein des Brics, ou encore le Nigeria.
14 abstentions de pays africains, 28 votes pour
14 abstentions sur 35 viennent des pays africains, avec entre autres le Congo-Brazzaville, Madagascar, le Mali, le Sénégal, le Soudan, l’Algérie, l’Éthiopie ou encore l’Afrique du Sud qui se sont abstenus. Ce qui confirme l’embarras d’une partie de continent vis-à-vis de ce conflit. Certains sont des alliés de longue date de Moscou, comme Alger, d’autres sont en train de se rapprocher des Russes, comme le Mali, en pleine transition.
Les Sud-Africains, par exemple, ont rappelé leur profonde inquiétude, le besoin de respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale des États. Mais Pretoria a aussi estimé que la résolution ne créait pas d’environnement constructif pour les négociations. Le pays aurait souhaité un texte plus centré sur le rapprochement, sur « la construction de ponts » entre Russie et Ukraine. « Il faut que les parties s’engagent à trouver un compromis, à construire la confiance. Mais ce texte ne permet pas cela », a expliqué la représentante sud-africaine.
« La résolution ne crée pas un environnement favorable à la diplomatie, au dialogue et à la médiation. L’Afrique du Sud estime qu’un plus grand effort aurait dû être déployé pour rapprocher les parties en vue d’un dialogue. Le texte dans sa forme actuelle pourrait créer un fossé encore plus grand, au lieu de contribuer à une résolution du conflit. La résolution aurait dû accueillir avec bienveillance le début des négociations entre les parties. On sait que les causes d’un conflit sont liés à l’inquiétude des parties vis-à-vis de leur sécurité. Il aurait fallu aborder cela dans la résolution. L’Afrique du Sud estime que l’ONU devrait être utilisée comme une plateforme pour rapprocher les points de vue, régler les divergences d’opinion, fournir des recommandations et un soutien aux parties pour qu’elles se parlent dans un esprit de compromis. Tout en faisant baisser les tensions, en s’engageant à la cessation des hostilités, en construisant la confiance. Malheureusement, le texte qui est devant nous n’a pas fait cela »
La Tunisie a expliqué avoir voulu soutenir les valeurs onusiennes. Le représentant de Tunis a demandé à ce qu’une solution pacifique soit trouvée par le dialogue, afin de mettre fin à cette tragédie humaine. « Aucune option militaire ne peut régler une crise. Seule la négociation y parviendra », a indiqué le pays.
Par ailleurs, peut-être pour envoyer un signal, des pays ont carrément décider de ne pas voter du tout : Burkina, Guinée, Cameroun ou encore Éthiopie. Un seul pays africain a voté contre cette résolution, sans surprise, il s’agit de l’Érythrée.
rfi.fr